Comtes rendus - Opéra National de Lorraine

Opéra Magazine, by Richard Martet
01 October 2010

Opéra Magazine – La Rondine Concert direction José Cura

The idea to perform as often as possible entire scenes, offered us a remarkable «Sogno di Doretta» from «La Rondine», in our opinion the top moment of the whole soirée. The introduction by Prunier, accompanied by the piano, allowed us to discover Christos Kechris (28 years old), a Greek tenor, highly promising and above all, touching!

Richard Martet, Opéra Magazine

Comtes rendus Opéra National de Lorraine

Parvenue a sa troisieme edition, la master class de Jose Cura — organisee a l’Opera National de Lorraine par l’association Nancy Opera Passion — est devenue un rendez-vous incontournable : salle comble pour le concert final, avec des spectateurs temoignant bruyamment leur enthousiasme. Le niveau d’ensemble du stage, de surcroit, a encore monte par rapport a 2009 (ooir 0. M n° 44 p. 69 d’octobre), aussi bien sur le plan de la qualite vocale que de la Jiff culte des morceaux travailles.
Ainsi, la mezzo nanceienne Aline Martin (33 ans) n’a pas eu tache aisee en lever de rideau, avec l’integralite de la scene d’entree d’Adalgisa dans Norma, duo avec Pollione compris. Elle a neanmoins fait valoir une voix a la couleur attachante, bien preparee techniquement, qui s’epanouit sans aucun probleme dans cette tessiture. Profitant d’une ecriture tres grave, parfaitement adaptee a ses moyens de tenor barytonnant, Jose Cura lui a offert une replique extremement convaincante, surtout si l’on tient compte des circonstances particulieres du concert : pas facile de chanter dos au public, tout en dirigeant l’orchestre et en parlant entre les differents morceaux ! Il ne l’a d’ailleurs refait qu’une fois : pour accompagner, apres l’entracte, le baryton panameen Ricardo Velasquez (32 ans) dans le duo Carlos/Posa de Don Carlo.

L’idee de donner des scenes entieres, aussi souvent que possible, nous a encore valu un remarquable «Sogno di Doretta» de La rondine, pour nous le sommet de la soiree. L’introduction par Prunier, avec l’accompagnement du piano, nous a permis de decouvrir Christos Kechris {28 ans), tenor grec inexperimente certes, mais fort prometteur et, surtout, emouvant. L’air proprement dit a permis a la superbe soprano italienne Cristina Giannelli (30 ans) de deployer tous ses charmes. Davantage connue que ses camarades de la master class (elle incarnait Donna Anna dans le film de Carlos Saura, Don Giovanni, naissance d’un opera), elle campe une Magda absolument irresistible, avec un timbre brillant, une emission homogene et un spectaculaire abattage. Il lui reste a apprendre a chanter vraiment piano dans l’aigu.

Le tenor francais Vincent Delhoume (27 ans) s’est lui aussi lance dans La rondine mais Pair de Ruggero, l’un des plus perilleux jamais surgis sous la plume de Puccini, le trouve un peu a court. La voix est jolie, mais elle ne se libere pas suffisamment, la musicalite de l’interprete ne parvenant pas toujours a compenser.

Un autre Francais, en revanche, a fait grosse impression. Le baryton Marc Scoffoni (31 ans), dont nous suivons avec attention la carriere depuis quelques annees, a fait valoir de nets progres dans une «Mort de Posa» impeccablement phrasee, avec un beau legato et beaucoup d’emotion. Les moyens ne soot sans doute pas exceptionnels, mais quelle remarquable maniere de s’en servir !

Les deux basses — le Tcheque Josef Skarka (29 ans) et le Polonais Miroslaw Witkowski (30 ans) — ne soot pas ininteressantes, mais l’affrontement entre Philippe II et le Grand Inquisiteur depasse vraiment leurs capacites. Curieuse idee, d’ailleurs, de la part de Jose Cura, de confier cette page redoutable a de jeunes chanteurs aussi inexperimentes.

Une mention encore pour la mezzo francaise Audrey Kessedjian (27 ans), pleine de promesses mais pas totalement a False dans l’air d’entree de Romeo (I Capuleti e i Montecchi), qui excede ses moyens actuels. La soprano roumaine Diana Croitoriu (29 ans) possede une voix enorme et un fort temperament, qu’elle discipline mal dans un « Vissi d’arte» Cache avec la mesure. Le tenor francais Florian Cafiero (24 ans), enfin, est un cas. 11 n’a repris ses etudes de chant qu’en 2009, mais le resultat est d’ores et deja surprenant : timbre attachant, ligne bien conduite, dans un «Lamento de Federico » de L’Arlesiana oti l’on entend, en permanence, les le-cons de son «maitre» d’un week-end.

Nous avons evoque Jose Cura chanteur et professeur. Impossible de passer sous silence le chef, d’une competence une fois encore sans faille, surtout dans Puccini et les «veristes». Le tenor argentin dirige cette musique bien mieux que beaucoup de maestri ayant pignon sur rue. 11 accompagne en plus remarquablement les solistes, obtenant de FOrchestre symphonique et lyrique de Nancy, avec un temps de repetition que l’on imagine -nes court, une flamboyante execution de la «Bacchanale» de Samson et Dalila.

Nous nous rejouissons done de le retrouver, en 2011-2012, au pupitre d’une nouvelle production de La rondine a l’Opera National de Lorraine, en corealisation avec l’association Nancy Opera Passion, dont il signera egalement la mise en scene et les decors.

Richard Martet

Source: Opéra Magazine No 55

01/10/2010